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Devant Anne et devant Caïphe
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fut conduit dans la loge du corps de garde, tandis que de tous côtés
on se moquait de son titre de Fils de Dieu. On tournait en dérision
les paroles dont il s’était servi, “assis à la droite de la Puissance
de Dieu et venant sur les nuées du ciel”. Tandis qu’il attendait, là,
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le jugement légal, il n’était l’objet d’aucune protection. La tourbe
ignorante, qui avait vu avec quelle sévérité il avait été traité dans
le conseil, en profita pour déchaîner tous les éléments diaboliques
de sa nature. La noblesse du Christ et son aspect divin ne faisaient
qu’exciter la fureur de ces misérables. Sa douceur, son innocence,
sa patience majestueuse leur inspiraient une haine démoniaque. La
miséricorde et la justice étaient foulées aux pieds. Aucun criminel
n’a jamais été traité avec autant d’inhumanité que le Fils de Dieu.
Mais une douleur plus vive déchirait le cœur de Jésus ; ce ne fut
pas une main ennemie qui lui porta le coup le plus sensible. Tandis
qu’il subissait les apparences d’un interrogatoire devant Caïphe, le
Christ avait été renié par l’un de ses disciples.
Après avoir abandonné leur Maître dans le jardin, deux des dis-
ciples s’étaient enhardis à suivre, à quelque distance, la cohue qui
entraînait Jésus. C’étaient Pierre et Jean. Jean était bien connu des
prêtres en tant que disciple de Jésus, et on l’introduisit dans la salle.
On espérait qu’après avoir été témoin de l’humiliation de son chef, il
ne pourrait plus croire à sa divinité. Grâce à une démarche de Jean,
Pierre put entrer, lui aussi.
Un feu avait été allumé dans la cour, car c’était l’heure la plus
froide de la nuit, celle qui précède immédiatement le lever du soleil.
Un groupe se tenait autour du feu, et Pierre eut la présomption d’y
prendre place. Il ne désirait pas qu’on le reconnût ; en se mêlant à la
foule d’un air indifférent, il espérait être pris pour l’un de ceux qui
avaient amené Jésus dans la salle.
Mais tandis que la lumière de la flamme éclairait le visage de
Pierre, la portière l’examinait avec la plus vive curiosité ; elle l’avait
vu entrer avec Jean, et ayant remarqué son regard abattu elle supposa
que c’était un disciple de Jésus. Comme elle était au service de
Caïphe, elle désirait éclaircir ses soupçons et demanda à Pierre :
“Toi aussi, n’es-tu pas des disciples de cet homme ?” Pierre éprouva
de la crainte et de la confusion. A l’instant tous les yeux se fixèrent
sur lui. Bien qu’il assurât ne pas comprendre, la femme insista, disant
aux personnes présentes que cet homme-là avait été vu avec Jésus.
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