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Le Calvaire
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mère, soutenue par Jean. Elle n’avait pu se résigner à rester éloignée
de son fils ; sachant que la fin était proche, Jean l’avait ramenée
auprès de la croix. A sa dernière heure, le Christ se souvint de
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sa mère. Regardant son visage ravagé de douleur, puis celui du
disciple, il dit à sa mère : “Femme, voici ton fils.” Puis il dit à Jean :
“Voici ta mère.” Jean comprit les paroles du Christ et accepta le
dépôt qui lui était confié. Il emmena tout de suite Marie chez lui,
et dès ce moment il en prit un tendre soin. O quel Sauveur plein de
compassion et d’amour ! Au milieu de ses souffrances physiques et
de l’angoisse de son esprit, il avait une pensée de sollicitude pour
sa mère. Il n’avait pas d’argent à lui laisser ; mais il était lui-même
dans le cœur de Jean comme un joyau enchâssé dans un écrin ; et il
fit à son disciple un legs précieux, sa mère, assurant à Marie ce dont
elle avait le plus grand besoin : la tendresse d’un être qui l’aimait
parce qu’elle aimait Jésus. En l’accueillant comme un dépôt sacré,
Jean obtenait une riche bénédiction. Marie devait lui rappeler, sans
cesse, son Maître bien-aimé.
L’exemple parfait de l’amour filial du Christ brille d’un éclat
toujours aussi vif à travers les siècles. Pendant environ trente années
Jésus s’était efforcé de porter sa part des fardeaux du foyer, en
travaillant chaque jour de ses mains. Et maintenant, jusque dans
sa dernière agonie, il pense aux besoins de sa mère, restée seule
dans la douleur. Tout disciple du Seigneur manifestera le même
esprit. Ceux qui suivent le Christ doivent sentir qu’une partie de
leur religion consiste à respecter leurs parents et à subvenir à leurs
besoins. Quiconque garde en son cœur l’amour du Christ ne refusera
jamais à son père et à sa mère la sollicitude et la tendresse auxquelles
ils ont droit.
Le Seigneur de gloire allait mourir pour la rançon de l’humanité.
Au moment où il abandonnait sa vie précieuse, le Christ n’était
pas soutenu par une joie triomphante. L’obscurité l’enveloppe et
l’oppresse. Ce n’était pas la peur de la mort qui l’accablait. Ce n’était
pas la douleur ou l’ignominie de la croix qui lui causaient cette
agonie inexprimable. Le Christ était le Prince des martyrs. Ce qui le
faisait souffrir par-dessus tout, c’était de sentir la malignité du péché,
dont l’homme a cessé d’apercevoir l’énormité en se familiarisant
avec lui. Le Christ constatait la puissante emprise du mal sur le cœur
humain, et prévoyait qu’un petit nombre d’hommes seraient disposés
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