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Jésus-Christ
de Dieu. Plusieurs de ceux qui avaient cru en lui perdirent tout espoir
en entendant son cri désespéré. Si Dieu avait abandonné Jésus, en
qui ses disciples pouvaient-ils se confier ? Quand les ténèbres qui
oppressaient l’esprit du Christ se furent retirées, il fut ressaisi par
le sentiment de ses souffrances physiques, et il dit : “J’ai soif.” Un
soldat romain, ému de pitié à la vue de ses lèvres desséchées, prit une
éponge qu’il plaça au bout d’une tige d’hysope, et, l’ayant trempée
dans du vinaigre, il la tendit à Jésus. Mais les prêtres se moquaient
de son agonie. Ils avaient éprouvé une véritable terreur lorsque les
ténèbres avaient recouvert la terre ; maintenant que leur frayeur était
dissipée, ils se reprenaient à craindre que Jésus ne leur échappât. Ils
se méprirent sur le sens de ses paroles : “
Eli, Eli, lama sabachthani ?
Ils dirent avec dédain : “Il appelle Elie.” Et négligeant cette dernière
occasion de soulager ses souffrances, ils ajoutaient : “Laisse, voyons
si Elie viendra le sauver.”
Le Fils immaculé de Dieu était là, suspendu à la croix, les chairs
lacérées de coups ; ses mains qui s’étaient si souvent étendues pour
bénir étaient clouées au bois ; ses pieds, toujours infatigables au
service de l’amour, étaient cloués, eux aussi ; sa tête royale était
meurtrie par une couronne d’épines ; ses lèvres tremblantes laissaient
échapper un cri de douleur. Tout ce qu’il a souffert, — les gouttes
de sang qui ont coulé de sa tête, de ses mains, de ses pieds, l’agonie
qui a secoué son corps, l’angoisse inexprimable qui a rempli son
âme quand le Père lui a dérobé son visage, — tout parle à chaque
enfant de l’humanité : C’est pour toi que le Fils de Dieu consent à
porter ce fardeau de culpabilité ; pour toi il a dépouillé la mort et
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ouvert les portes du paradis. Celui qui a calmé les flots irrités et
marché sur les vagues écumantes, qui faisait trembler les démons
et fuir la maladie, qui ouvrait les yeux des aveugles et rendait la vie
aux morts, — s’offre sur la croix, en sacrifice par amour pour toi. Il
a porté le péché, il a subi la colère de la justice divine ; pour toi, il a
été traité comme le péché même.
Les assistants attendaient en silence la fin de cette scène redou-
table. Le soleil brillait, mais la croix restait enveloppée de ténèbres.
Les prêtres et les chefs regardèrent dans la direction de Jérusalem;
voici qu’une nuée épaisse s’étendait sur la ville et sur les plaines
de la Judée. Le Soleil de justice, la Lumière du monde, retirait ses
rayons à la ville de Jérusalem, autrefois privilégiée. Les terribles