170
Jésus-Christ
cet infirme avait vécu de longues années de misère. Ceux qui le pre-
naient en pitié le portaient sous les portiques quand on prévoyait que
les eaux allaient être troublées, mais au moment favorable personne
n’était là pour l’aider. Il avait vu le mouvement des eaux mais n’avait
jamais pu aller plus loin que le bord de la piscine. D’autres, plus
forts que lui, le devançaient dans l’eau. Impossible de lutter avec
succès contre une foule égoïste et acharnée. Les efforts poursuivis
avec obstination pour atteindre le but, et les nombreuses déceptions
finiraient bientôt par épuiser les forces défaillantes du malade.
Celui-ci gisait sur sa natte, dressant la tête de temps en temps
pour surveiller la piscine, et voici qu’un visage tendre et compa-
tissant se pencha sur lui et une voix lui dit : “Veux-tu retrouver la
santé ?” Son attention fut éveillée et l’espoir reprit place dans son
cœur. Il eut le pressentiment qu’un secours allait lui arriver. Mais son
courage ne tarda pas à s’évanouir, car il se souvint que bien souvent
il avait tenté d’atteindre la piscine ; il lui semblait n’avoir que peu
de chances de vivre assez longtemps pour voir l’eau agitée. Aussi
répondit-il, d’un air plein de lassitude : “Seigneur, je n’ai personne
pour me jeter dans la piscine quand l’eau est agitée, et pendant que
j’y vais, un autre descend avant moi.”
Au lieu d’exiger la foi en sa personne, Jésus dit simplement
à l’infirme : “Lève-toi, ... prends ton lit et marche.” Cet homme
s’est emparé de cette parole par la foi. Chaque nerf, chaque muscle
éprouve le frémissement de la vie, les membres perclus recouvrent
la santé. Sans hésiter il décide d’obéir à l’ordre du Christ, et tous ses
muscles se montrent dociles. Il saute sur ses pieds et se trouve prêt à
agir.
Jésus ne lui avait pas promis une aide divine. Cet homme aurait
pu commencer à douter, ce qui lui eût ôté sa seule chance de guérison.
[185]
Mais il fit confiance à la parole du Christ et il fut fortifié alors qu’il
agissait en conséquence.
Une même foi peut nous assurer la guérison spirituelle. Le péché
nous a séparés de la vie divine. Nos âmes sont paralysées. Aussi
vrai que cet impotent était incapable de marcher, nous sommes inca-
pables, de nous-mêmes, de vivre une vie sainte. Ils sont nombreux
ceux qui sentent leur impuissance et soupirent après une vie spiri-
tuelle qui rétablisse leur communion avec Dieu ; ils font de vains
efforts pour atteindre ce but. Le désespoir leur arrache ce cri : “Mal-