La révolte de Coré
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Allant plus loin, ils réussirent à s’associer deux cent cinquante
hommes haut placés dans la congrégation. Soutenus par ce parti
puissant et influent, les conspirateurs ne doutèrent plus de la réussite
de leur plan, à savoir : apporter un changement radical dans le gou-
vernement, et opérer des réformes importantes dans l’administration
de Moïse et d’Aaron.
La jalousie avait donné naissance à l’envie ; celle-ci mena à
l’insurrection. Ces hommes avaient tant discuté sur le droit de Moïse
à exercer l’autorité et sur les honneurs dont il jouissait qu’ils en
étaient venus à se figurer que sa situation était très enviable, et que
n’importe lequel d’entre eux aurait pu la remplir aussi bien que
lui. Ils s’étaient mutuellement suggestionnés au point de croire que
ces charges, Moïse et Aaron les avaient assumées de leur propre
chef. Les mécontents affirmaient qu’en prenant sur eux la prêtrise
et le gouvernement, distinctions auxquelles leur maison n’avait pas
plus de droit que tant d’autres, ils s’étaient élevés au-dessus de la
congrégation de l’Éternel ; pas plus saints que le peuple, ils auraient
dû se contenter d’être les égaux de leurs frères qui, aussi bien qu’eux,
étaient favorisés de la présence et de la protection de Dieu.
Comprenant que rien n’est plus agréable aux gens coupables
d’une mauvaise action que d’être entourés de sympathie, les conjurés
firent alors une démarche auprès du peuple. Coré et ses adeptes
déclarèrent que leurs murmures n’avaient été pour rien dans les
jugements de Dieu. La congrégation, ajoutèrent-ils, n’était pas dans
son tort, puisqu’elle ne réclamait que son droit. En revanche, Moïse
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avait montré un esprit autoritaire en censurant un peuple favorisé de
la présence divine.
Coré passa en revue l’histoire de leurs pérégrinations à travers le
désert et de leurs privations, rappela que leurs murmures et leur déso-
béissance avaient été suivis de la mort d’un grand nombre d’entre
eux, d’où l’on pouvait conclure que si Moïse avait agi autrement
leurs déboires auraient été évités. Il était donc responsable de leurs
malheurs, et s’ils n’entraient pas au pays de Canaan, c’était la faute
de la mauvaise administration de Moïse et d’Aaron. On en déduisait
que si Coré devenait le conducteur du peuple et si, au lieu de le
censurer, il savait l’encourager en appuyant davantage sur sa bonne
conduite, leur voyage serait paisible et prospère. Au lieu d’errer dans
le désert, ils pourraient marcher directement vers la terre promise.