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Chapiter 8 — Luther à la diète de Worms
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à côté de moi, pour le nom de Jésus-Christ, ton Fils bien-aimé, ma
défense, mon bouclier et ma forteresse.”
Pour préserver le réformateur d’un sentiment de confiance en sa
propre force et de témérité devant le danger, Dieu, dans sa sagesse,
permettait qu’il eût l’intuition de son péril. Ce n’était pas, en effet, la
crainte des souffrances personnelles, ni la perspective de la torture ou
de la mort apparemment imminentes qui le terrifiaient, et ce n’était
point en vue de sa propre sécurité qu’il luttait avec Dieu ; c’était
pour le triomphe de l’Evangile. L’heure de la crise était arrivée, et
il se sentait incapable de l’affronter. Un acte de faiblesse de sa part
eût pu compromettre la cause de la vérité. Les angoisses de son
âme en cette occasion peuvent être comparées à celles de Jacob
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au torrent de Jabok. Comme lui, Luther lutta avec Dieu et obtint
la victoire. Conscient de son impuissance, cramponné à Jésus, son
puissant Libérateur, il fut fortifié par l’assurance qu’il ne paraîtrait
point seul devant l’assemblée. La paix rentra dans son âme, et il se
réjouit qu’il lui fût permis d’élever la Parole de Dieu devant les chefs
de la nation.
Les regards fixés sur Dieu, Luther se prépara à la lutte. Il fit
le plan de sa réponse, relut quelques passages de ses ouvrages et
tira des Ecritures des preuves propres à soutenir ses positions. Puis,
posant sa main gauche sur le Livre sacré ouvert sur la table, et levant
la main droite au ciel, il “jura de demeurer fidèle à l’Evangile et de
confesser ouvertement sa foi, dût-il sceller cette confession de son
sang”.
Quand il comparut à nouveau devant la diète, son visage ne
portait aucune trace de crainte ou de timidité. Témoin de Dieu
devant les grands de la terre, il respirait le calme, la paix et une
noble bravoure. Son discours, en réponse à l’officier impérial qui lui
demandait sa décision, fut courtois et respectueux ; sa voix claire était
contenue et sans éclats ; toute sa personne manifestait une confiance
et une joie qui surprirent l’assemblée. Il parla en ces termes :
“Sérénissime Empereur ! illustres princes, gracieux seigneurs ! ...
Comparaissant aujourd’hui devant vous, par la miséricorde de Dieu,
selon l’ordre qui m’en fut donné hier, je conjure votre Majesté et
vos augustes Altesses d’écouter avec bonté la défense d’une cause
qui, j’en ai l’assurance, est juste et bonne. Si, par ignorance, je
manquais aux usages et aux bienséances des cours, je vous prie