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La Tragédie des Siècles
dernier médiateur humain, les Juifs répondirent par des imprécations
et des quolibets. Ils avaient fermé l’oreille à la voix du Fils de Dieu ;
maintenant, toutes les supplications ne faisaient que les rendre plus
obstinés à résister jusqu’au bout. Titus ne réussit pas à sauver le
temple. Un plus grand que lui avait déclaré qu’il n’en resterait pas
pierre sur pierre.
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L’aveugle obstination des chefs juifs et les crimes affreux per-
pétrés dans la ville assiégée excitèrent à tel point l’horreur et l’indi-
gnation des soldats romains que Titus finit par se décider à prendre
le temple d’assaut, résolu toutefois à le conserver s’il était possible.
Mais ses ordres furent négligés. Un soir, à peine s’était-il retiré dans
sa tente que les Juifs, sortant du temple, attaquèrent les assaillants.
Dans la chaleur du combat, un soldat jeta un brandon allumé à tra-
vers le portique. Bientôt, les salles boisées de cèdre qui entouraient
le temple furent la proie des flammes. Accourant en hâte sur les lieux
avec ses légionnaires, Titus donna l’ordre de combattre l’incendie. Il
ne fut pas obéi. Dans leur rage, les soldats passèrent au fil de l’épée
un grand nombre de ceux qui s’étaient réfugiés dans le lieu sacré. Le
sang coulait comme de l’eau sur les marches du temple. Des milliers
de Juifs périrent. Le bruit de la bataille était dominé par des voix qui
disaient : “
I-Kabod !
” c’est-à-dire : la gloire s’en est allée.
“Titus n’avait pas réussi à apaiser la fureur de la soldatesque.
Pénétrant avec ses officiers dans l’intérieur de l’édifice sacré, il fut
émerveillé de sa splendeur ; et comme les flammes n’avaient pas
encore atteint le lieu saint, tentant un dernier effort pour le sauver,
il conjura ses soldats de combattre les progrès de l’incendie. Armé
de son bâton de de commandement, le centenier Liberalis s’efforça
d’imposer l’obéissance. Mais la présence même du général en chef
ne parvint pas à arrêter la rage des Romains contre les Juifs ; rien
ne put faire entendre raison à des hommes aveuglés par le carnage
et alléchés par l’appât du pillage. Voyant l’or étinceler de toutes
parts, à la lumière sinistre des flammes, les soldats s’imaginèrent
que des trésors incalculables se trouvaient cachés dans le sanctuaire.
Aveuglés par la fumée et les flammes, les officiers durent battre en
retraite et abandonner le noble édifice à son sort.
” Spectacle terrifiant pour les Romains, mais combien plus pour
les Juifs ! Toute la crête de la colline qui dominait la ville flamboyait
comme un volcan. Avec le fracas du tonnerre, les bâtiments, l’un
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