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La Tragédie des Siècles
autant à préparer le chemin aux succès futurs de la papauté, avec ses
cérémonies pompeuses, que les ténèbres du Moyen Age.
Dans le mouvement qui se dessine aux Etats-Unis pour assu-
rer l’appui de l’Etat aux institutions et aux usages de l’Eglise, les
protestants emboîtent le pas derrière les romanistes. Il y a plus :
ils ouvrent à la papauté la porte qui lui permettra de retrouver en
Amérique la suprématie qu’elle a perdue en Europe. Et ce qui rend
ce mouvement plus significatif, c’est le fait que son but principal
consiste à imposer l’observation du dimanche, institution qui émane
de Rome, et qu’elle considère comme le signe de son autorité. Le
désir de se conformer aux coutumes du monde et de vénérer des tra-
ditions humaines au lieu des commandements de Dieu pénètre dans
les églises protestantes et les pousse à faire en faveur du dimanche
ce que la papauté a fait avant elles. Ce désir correspond à l’esprit de
Rome.
Si le lecteur veut se rendre compte des moyens qui seront mis
en œuvre dans le conflit qui se prépare, il n’a qu’à lire l’histoire des
mesures employées par Rome à cet effet au cours des siècles passés.
S’il désire savoir comment papistes et protestants traiteront ceux qui
méconnaîtront leurs dogmes, qu’il s’instruise sur la manière dont
Rome a traité le sabbat de l’Eternel et ses défenseurs.
Des édits royaux, des décisions de conciles généraux, des or-
donnances de l’Eglise appuyées par le pouvoir séculier, tels sont les
moyens qui furent employés pour donner à une fête païenne une
place d’honneur dans le monde chrétien. La première disposition
légale en faveur du dimanche fut l’édit de Constantin
Aux termes
de cet édit, les habitants des villes devaient se reposer “au jour vé-
nérable du soleil”, tandis que les gens de la campagne pouvaient
vaquer à leurs occupations ordinaires. Bien que cet édit fût virtuelle-
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ment païen, il fut promulgué par Constantin après son adhésion au
christianisme.
Estimant sans doute que le décret impérial n’était pas suffisant
pour suppléer à l’absence de tout ordre divin, l’évêque opportuniste
de Césarée, grand ami et flatteur de l’empereur, prétendit que Jésus
avait transféré le repos du sabbat au dimanche. Eusèbe reconnaît
involontairement être incapable de produire un seul témoignage
1. En 321 de notre ère. Voir Appendice.