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La Tragédie des Siècles
ils s’efforçaient d’inculquer ces principes à la jeunesse. Dès leur âge
le plus tendre, les enfants acquéraient la connaissance des saintes
Lettres, et apprenaient à considérer comme sacrés les droits de la loi
de Dieu. Et comme les exemplaires du saint Livre étaient rares, ils en
gravaient les paroles dans leur mémoire, Plusieurs pouvaient répéter
par cœur des portions considérables de l’Ancien et du Nouveau
Testament. Ils associaient la pensée de Dieu non seulement aux
cimes altières dont ils étaient entourés, mais aussi aux devoirs de la
vie de chaque jour, apprenant à leurs enfants à être reconnaissants
envers Dieu, l’Auteur des biens dont ils jouissaient.
Si tendres et affectueux que fussent les parents, ils aimaient
trop sagement leurs enfants pour les laisser s’accoutumer à une vie
facile. Ces jeunes gens avaient la perspective d’une vie d’épreuves
et de renoncements qui pouvait se terminer par le martyre. Dès
leur enfance, ils étaient accoutumés à endurer des privations et à
se soumettre à l’autorité paternelle. Ils apprenaient aussi très tôt à
porter des responsabilités, à ne parler qu’avec circonspection et à
connaître la valeur du silence. Une parole inconsidérée prononcée
devant leurs ennemis pouvait mettre en danger non seulement la
vie de celui qui la proférait, mais aussi celle de centaines de ses
frères, tant les ennemis de la vérité, semblables à des loups affamés,
poursuivaient sans relâche ceux qui osaient manifester librement
leur foi.
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Les Vaudois, ayant sacrifié à la vérité toute prospérité terrestre,
demandaient péniblement leur pain quotidien au sol de leurs mon-
tagnes. Chaque pouce de terre cultivable jusque dans les combes et
les ravins était utilisé. Une vie de stricte économie et de renonce-
ment faisait partie de l’éducation que recevaient les enfants comme
unique héritage. On leur enseignait que, conformément aux desseins
de Dieu, la vie est une discipline, et qu’ils ne pouvaient subvenir à
leurs besoins que par le travail personnel, la prévoyance, l’économie
et la foi en Dieu. C’était un régime laborieux et pénible, mais sain et
convenant à l’homme déchu : l’école voulue de Dieu en vue de son
éducation et de son développement moral. Mais tout en accoutumant
la jeunesse au travail et aux privations, on ne négligeait pas sa culture
intellectuelle. On lui apprenait que toutes ses facultés appartiennent
à Dieu, et qu’il lui incombe de les développer en vue de son service.