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La Tragédie des Siècles
combattre son antagoniste, accompagnant ses ordres de terribles
anathèmes à l’adresse de ses ennemis et promettant le ciel à ses
partisans. Ces événements affaiblissaient singulièrement le prestige
papal. Les factions rivales étant occupées à se combattre mutuelle-
ment, Wiclef fut laissé en paix, tandis que se croisaient anathèmes
et récriminations, et que des torrents de sang étaient versés pour
soutenir les prétentions des deux adversaires. Pendant que l’Eglise
était le théâtre du crime et du scandale, le réformateur, de sa paisible
retraite de Lutterworth, s’employait de toutes ses forces à détourner
l’attention du monde du spectacle des discordes papales pour la
porter sur Jésus, le Prince de la paix.
Le schisme ouvrait le chemin à la Réforme. Les querelles et la
dégradation morale dont il était la cause, ouvraient les yeux des gens
sur la vraie nature de la papauté. Dans un traité sur “
le schisme des
papes
”, Wiclef invitait ses lecteurs à se demander sérieusement si
ces deux prêtres ne disaient pas la vérité quand ils s’anathématisaient
l’un l’autre, se traitant mutuellement d’antichrist. “Dieu, disait-il,
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n’a pas permis que le Malin régnât par l’un de ces deux prêtres
seulement. ... Il leur a partagé le pouvoir, afin que les fidèles, au nom
de Jésus-Christ, pussent en avoir raison plus aisément
Comme son Maître, Wiclef prêchait l’Evangile aux pauvres. Et,
non content de répandre la lumière dans les humbles demeures de
sa paroisse de Lutterworth, il voulut la porter dans toutes les parties
de l’Angleterre. A cette fin, il organisa un corps de prédicateurs,
hommes simples et pieux, aimant la vérité et ne désirant rien tant
que de la propager. Ces hommes allaient de lieu en lieu, prêchant sur
les places des marchés, dans les rues des grandes villes et dans les
campagnes. Ils visitaient les vieillards, les malades et les pauvres, et
leur annonçaient la bonne nouvelle de la grâce de Dieu.
En sa qualité de professeur de théologie à Oxford, Wiclef prê-
chait la Parole de Dieu dans les auditoires de l’Université. Son zèle
à présenter la vérité à ses étudiants lui valut le titre de “docteur de
l’Evangile”. Mais l’œuvre capitale de sa vie fut la traduction des
saintes Ecritures en langue anglaise. Dans un ouvrage intitulé
De la
véracité et du sens des Ecritures
, il exprimait son intention de tra-
1. R. Vaughan,
Life and Opinions of John Wycliffe 2 :6
.