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Chapiter 6 — Hus et Jérôme
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conjure, ami, de ne point rompre ce cachet avant d’avoir acquis la
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certitude de ma mort
Pendant toute la durée de son voyage, Hus eut la preuve que
sa doctrine était connue au loin et il put constater la faveur dont
sa cause était l’objet. Le peuple accourait au-devant de lui ; dans
quelques villes, il était escorté par les magistrats.
Arrivé à Constance, il jouit d’abord d’une entière liberté. Le pape
ajouta au sauf-conduit de l’empereur une assurance personnelle
de sa protection. Mais peu après, au mépris de ces nombreuses
et solennelles déclarations, par ordre du pape et des cardinaux, le
réformateur fut arrêté et jeté dans une prison infecte, et plus tard
transféré dans un château fort au bord du Rhin. Ne tirant pas grand
profit de sa perfidie, le pape se vit à son tour interné dans le même
château
Convaincu, devant le concile, des crimes les plus odieux,
entre autres de meurtre, de simonie, d’adultère, “et de péchés que
la décence ne permet pas de mentionner” (telle est la déclaration
du concile), Jean XXIII fut privé de la tiare. Les antipapes furent
également déposés, et un nouveau pontife fut choisi.
Le même concile, tout en réclamant une réforme et en déposant
le pape pour des crimes plus énormes que ceux dont Hus accusait
les prêtres, voulut aussi en finir avec le réformateur. L’incarcération
de Hus avait provoqué une grande indignation en Bohême. De puis-
sants seigneurs adressèrent au concile une protestation véhémente
contre cet affront. L’empereur, qui répugnait à la violation d’un sauf-
conduit, s’opposait aux machinations des ennemis du réformateur.
Acharnés et résolus, ceux-ci firent appel aux préjugés de Sigismond
et à son zèle pour l’Eglise. Ils établirent, par de longs arguments,
qu’on “n’était pas tenu, malgré les sauf-conduits des empereurs et
des rois, de garder la foi aux hérétiques, ni aux personnes suspectes
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d’hérésie
, et ils finirent par l’emporter.
Affaibli par la maladie, par sa longue réclusion, par l’air humide
et infect de son cachot et par une fièvre qui faillit mettre un terme
à ses jours, Hus fut enfin appelé à comparaître devant le concile.
Chargé de chaînes, il parut devant l’empereur qui avait pris, sur
son honneur et sa bonne foi, l’engagement de le protéger. Au cours
1. E. de Bonnechose, ouv. cité, vol. I.
2. E. de Bonnechose, ouv. cité, vol. I., p. 300.
1. Lenfant,
Histoire du Concile de Constance
, vol. I.