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La Tragédie des Siècles
d’un long interrogatoire, le réformateur soutint fermement la vérité.
En présence des dignitaires réunis de l’Eglise et de l’Empire, il
fit entendre une protestation solennelle contre les désordres de la
hiérarchie. Mis en demeure de choisir entre la rétractation et la mort,
il choisit cette dernière.
Hus avait été visiblement soutenu par la grâce de Dieu. Pendant
les semaines de souffrances qui s’écoulèrent avant la sentence défini-
tive, il avait joui d’une paix céleste. Il écrivait à un ami : “Je trace ces
lignes dans ma prison et de ma main enchaînée, attendant de subir
demain ma sentence de mort. ... Lorsque nous nous retrouverons
dans l’heureuse éternité, tu sauras avec quelle clémence le Seigneur
a daigné m’assister dans mes cruelles épreuves
De sa triste prison, Hus prévoit le triomphe de la vraie foi. Dans
un songe il voit sa chapelle de Bethléhem, où il avait prêché l’Evan-
gile, il voit le pape et ses évêques occupés à effacer les images du
Christ qu’il avait fait peindre sur les parois. Il en est très affligé ;
“mais le lendemain il voit de nouveau dans un rêve plusieurs peintres
occupés à repeindre les images en plus grand nombre et avec des
couleurs plus vives. Ce travail achevé, les peintres, entourés d’une
grande foule, s’écrient : Que maintenant viennent papes et évêques !
ils ne les effaceront plus jamais.” Après avoir relaté ce dernier songe,
le réformateur ajoute : “je tiens ceci pour certain que l’image du
Christ ne sera jamais effacée. Ils ont voulu la détruire ; mais elle sera
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peinte à nouveau dans les cœurs par de meilleurs prédicateurs que
moi
Quand, pour la dernière fois, Hus comparut devant le concile,
il se trouva dans une nombreuse et brillante assemblée où l’on
remarquait l’empereur, les princes de l’empire, les délégués royaux,
les cardinaux, les évêques. Des prêtres et une foule immense étaient
présents. De toutes les parties de la chrétienté, étaient accourus les
témoins du premier des grands sacrifices marquant la longue lutte
qui devait aboutir à la liberté de conscience.
Invité à faire part de sa décision finale, Hus répéta son refus
d’abjurer, puis, portant son regard pénétrant sur le monarque hon-
teusement infidèle à sa parole d’honneur, il ajouta : “Je suis venu à
2. E. de Bonnechose, ouv. cité, vol. II.
1. Voir Appendice.