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Chapiter 12 — La Réforme en France
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“J’ai vécu pharisien, selon la secte la plus rigide de notre religion
Romaniste fervent, il désirait ardemment détruire tout ce qui s’op-
posait à l’Eglise. “Entendait-il parler contre le pape tant vénéré, il
grinçait des dents comme un loup furieux”, et il eût voulu que la
foudre frappât le coupable en sorte qu’il en fût “du tout abattu et
ruiné”. Inlassable dans le culte qu’il rendait aux saints, il faisait avec
Lefèvre le tour des églises de Paris pour y adorer devant les autels,
et déposer des offrandes devant les reliques. Mais ces dévotions ne
lui apportaient pas la paix de l’âme. Tous ses actes de piété et toutes
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ses pénitences ne parvenaient pas à le libérer de la conviction de son
péché. La voix du réformateur qui annonçait le “salut par grâce” fut
pour lui comme une voix céleste. “L’innocent est condamné, et le
criminel est acquitté.” “Seule la croix du Christ ouvre les portes du
ciel et ferme les portes de l’enfer.”
Farel accepta joyeusement la vérité. Par une conversion compa-
rable à celle de l’apôtre Paul, il passa de l’esclavage de la tradition
à la liberté des enfants de Dieu. Au lieu de ressembler à un “loup
enragé”, il devint “paisible, doux et aimable comme un agneau, le
cœur entièrement retiré du pape et adonné à Jésus-Christ”.
Tandis que Lefèvre continuait à communiquer la lumière à ses
élèves, Farel, aussi zélé pour la cause du Christ qu’il l’avait été
pour celle du pape, allait prêcher la vérité en public. Un dignitaire
de l’Eglise, Briçonnet, évêque de Meaux, se joignit bientôt à eux.
D’autres docteurs, aussi éminents par leur science que par leur piété,
se mirent eux aussi à proclamer l’Evangile. La foi nouvelle fit des
adhérents dans toutes les classes de la société, depuis les artisans et
les paysans, jusqu’aux nobles et aux princes. La sœur de François
Ier, Marguerite de Navarre, ayant embrassé la foi réformée, le roi
lui-même et la reine-mère semblèrent pendant un temps la considérer
avec faveur. Les réformateurs, éblouis, voyaient déjà approcher le
jour où la France serait gagnée à la cause de la Réforme.
Ils allaient être déçus dans leur attente. Des épreuves et des per-
sécutions, miséricordieusement voilées à leurs yeux, attendaient ces
disciples du Christ. Dans l’intervalle, un temps de paix leur permit
de prendre des forces en vue de l’orage à venir, et la cause de la Ré-
forme fit de rapides progrès. Dans son diocèse, l’évêque de Meaux
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Actes 26 :5
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