Page 117 - La Trag

Basic HTML Version

Chapiter 7 — Luther se sépare de Rome
113
siastiques, furieux de voir leur connivence avec le mal dénoncée et
leurs profits menacés, s’unirent pour soutenir leur cause. Le réforma-
teur dut faire face à de violents accusateurs. Les uns lui reprochaient
d’avoir agi par impulsion et d’être non dirigé par Dieu, mais poussé
par l’orgueil et la présomption. “Qui ne sait, répondait-il, que l’on
met rarement une idée nouvelle en avant sans être accusé d’orgueil
et de chercher des querelles ?... Jésus-Christ et tous les martyrs
n’ont-ils pas été mis à mort comme contempteurs de la sagesse du
temps, et pour avoir avancé des nouveautés, sans prendre auparavant
humblement conseil des organes de l’ancienne opinion ?”
Il ajoutait : “Ce que je fais s’accomplira non par la prudence des
hommes, mais par le conseil de Dieu. Si l’œuvre est de Dieu, qui
l’arrêtera ? Si elle n’est pas de lui, qui la soutiendra ?... Non pas ma
volonté, ni la leur, ni la nôtre. Que ta volonté se fasse, ô Père saint
qui es dans le ciel !”
Bien qu’il eût été poussé par l’Esprit de Dieu à entreprendre
sa tâche, Luther ne put la poursuivre sans avoir à livrer de rudes
combats. Le dénigrement, la calomnie de ses intentions et mobiles,
les insinuations perfides sur son caractère fondirent sur lui comme
un torrent débordé, et ne furent pas sans effet. Il avait cru que les
conducteurs du peuple, tant dans l’Eglise que dans les écoles, se
joindraient à lui dans une œuvre de réforme. Les encouragements
qui lui étaient venus de la part de personnages influents l’avaient
[139]
rempli de joie et d’espérance. Il voyait déjà par anticipation se le-
ver des jours meilleurs pour l’Eglise. Mais aux encouragements
avaient succédé les incriminations et les dénonciations. Plusieurs
dignitaires de l’Eglise et de l’Etat, convaincus de la rectitude des
thèses, ne tardèrent pas à s’apercevoir que leur acceptation entraî-
nerait de grandes transformations. Eclairer et réformer le peuple,
c’était virtuellement saper l’autorité du pape, tarir des milliers de
ruisseaux qui alimentaient ses trésors, et réduire considérablement
l’extravagance et le luxe des chefs de l’Eglise. De plus, donner au
peuple la liberté de penser et d’agir en êtres responsables, ne comp-
tant pour leur salut que sur Jésus-Christ, c’était renverser le trône
pontifical, et éventuellement détruire leur propre autorité. Pour ces
raisons, ils repoussèrent la connaissance que Dieu leur envoyait, et,
en s’opposant à l’homme qu’il avait désigné pour les éclairer, ils se
dressèrent contre le Christ et contre sa vérité.