Page 202 - La Trag

Basic HTML Version

198
La Tragédie des Siècles
les prophètes et les apôtres ont jadis prêché, et ce qu’a cru toute la
compagnie des saints. Ma foi a en Dieu une confiance qui résistera à
toutes les puissances de l’enfer.” Les gens de bien qui se trouvaient
épars dans la foule admiraient sa fermeté, et la pensée qu’il laissait
derrière lui une femme désolée touchait tous les cœurs. ...
”François et ses courtisans n’en avaient pas encore assez. “Aux
Halles, aux Halles !” s’écriait-on, et une masse de curieux couraient
précipitamment de ce côté, sachant que les bourreaux y avaient
[244]
préparé un second divertissement de même nature. A peine le roi et
son cortège y furent-ils arrivés, qu’on commença à faire l’effroyable
estrapade. ...
“François Ier rentra satisfait au Louvre ; les courtisans qui l’en-
touraient disaient que le triomphe de la sainte Eglise était à jamais
affermi dans le beau royaume de France. ... Le 29 janvier, le roi
“rendit un édit pour l’extirpation de la secte luthérienne, qui a pul-
lulé et pullule dans le royaume ; avec commandement de dénoncer
ses sectateurs”. En même temps, il adressa une circulaire à tous les
parlements, leur prescrivant de donner “aide et prisons”, pour que
l’hérésie fût promptement extirpée
L’Evangile de paix, rejeté par la France, allait en effet être
banni du royaume, mais à quel prix ! Le 21 janvier 1793, deux cent
cinquante-huit ans après ces lamentables scènes, une procession
d’un autre genre parcourait les rues de Paris, pour une raison tout à
fait différente. Le roi en était de nouveau le principal personnage ; de
nouveau on entendait les clameurs de la populace demander d’autres
victimes ; de nouveau se dressaient de noirs échafauds pour servir
à d’affreuses exécutions. “Louis XVI, se débattant entre les mains
de ses geôliers et de ses bourreaux, était traîné sur la planche et
maintenu de vive force, en attendant que le couperet fît tomber sa
tête
” Le roi de France ne devait pas périr seul ; près du même
lieu, pendant les jours sanglants de la Terreur, deux mille huit cents
hommes et femmes furent décapités.
La Réforme avait ouvert le Livre de Dieu devant le monde ; elle
avait rappelé les préceptes de la loi divine et proclamé ses droits sur
les consciences. L’Amour infini avait fait connaître aux hommes les
1. Merle d’Aubigné,
Hist. de la Réformation au temps de Calvin
, liv. IV, chap XII, p.
177-178, 180, 181-183.
2. Cf.
Histoire Moderne et Contemporaine, Dufayard et Suérus, 488, 489
.